•  

     Dans le calice d' une fleur

    la guêpe un jour voyant l' abeille,

    s' approche en l' appelant sa soeur.

    Ce nom sonne mal à l' oreille

    de l' insecte plein de fierté,

    qui lui répond : nous soeurs ! Ma mie,

    depuis quand cette parenté ?

    Mais c' est depuis toute la vie,

    lui dit la guêpe avec courroux :

    considérez-moi, je vous prie :

    j' ai des ailes tout comme vous,

    même taille, même corsage ;

    et, s' il vous en faut davantage,

    nos dards sont aussi ressemblants.

    Il est vrai, répliqua l' abeille,

    nous avons une arme pareille,

    mais pour des emplois différents.

    La vôtre sert votre insolence,

    la mienne repousse l' offense ;

    vous provoquez, je me défends. 

     

    Jean-Pierre Claris de Florian

     


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  • L'abeille, la guèpe et le bourdon

     

    Une gentille abeille

    Aimait tendrement un bourdon,

    N'ayant pas sa pareille

    Sous la couette ou l'édredon.

     

    Et la toute mignonne

    Tenue au rucher tout le jour,

    Pour sa reine patronne

    Etait au moulin et au four.

     

    Le mâle, sans problème,

    Se reposait sur une fleur, 

    Soleil et grande flemme,

    Couché, les deux mains sur son coeur.

     

    Une méchante guêpe

    Se promenait dans le jardin,

    Guettant comme une nèpe

    Sa belle proie ou un dandin.

     

    S'approchant, douce muse, 

    Bien près du joli fanfaron,

    Imaginez toute sa ruse,

    Nue, elle montra son giron.

     

    Le mari, l'infidèle,

    Profita bien de ce détour,

    Mais vite la cruelle

    Se fatigua de cet amour.

     

    Depuis, seul, défaitiste,

    Notre pacha crève d'ennui,

    Un petit rien l'attriste,

    Il dort le jour, comme la nuit.

     

    La guêpe, elle est bien comme

    La belle femme à l'abandon,

    Elle pique votre homme 

    Et puis vous laisse le bourdon !

     

    Dominique Simonet


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  •  LE BOURDON

     

    Un séduisant bourdon courtisant bien des fleurs

    Rentrait ivre le soir de humer les corolles -

    Bafouillant il jurait et donnait sa parole

    De s'être comporté en tout bien tout honneur.

     

    Cependant ses habits dégageaient les odeurs

    Des belles visitées sans autre protocole

    Que la porte forcée par l'insecte frivole

    Ecumant les jardins - habile maraudeur.

     

    La journée s'écoulait et les consommateurs

    Se pressaient pour goûter toute l'âme et le coeur

    De ces belles de jour en fervents amateurs.

     

    La fête du nectar éclairait la campagne

    Des milliers de couleurs de ces fines compagnes

    Décorant la vallée - la plaine et la montagne.

     

    A force de sniffer accoudé au comptoir

    De cabaret en cabaret voici le soir

    Soufflant sur la vallée des parfum d'encensoir.

     

    Et notre beau bourdon revient dans sa famille

    Installée tout au fond d'une vieille charmille

    Où le bébé bourdon prolifère et fourmille.

     

    Les fleurs vont s'endormir et s'ouvriront demain

    Aux rayons du soleil déjà sur les chemins

    Qui parsèment le monde où vit le genre humain.

     

    Tous les petits bourdons bientôt s'envoleront

    Eux aussi vers les fleurs de tous leurs ailerons

    Et les troublantes senteurs les enivreront !...

     

    Denis Germain 

     

     


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  •  

     Elle avait une robe où fleurissait, candide

    La pivoine en bouquets, et je riais alors

    De la voir si jolie. Ma main étreint le vide

    Aujourd’hui, et mes yeux la cherchent au-dehors

     

    Mais ils ne trouvent plus sa démarche légère

    Qui faisait s’envoler les papillons soyeux

    Dans l’azur délicat d’un matin de lumière

    Où s’épanouissait son beau rire joyeux.

     

    La pivoine languit au jardin délaissé

    Et ses pétales lourds s’effeuillent sur la terre

    Rien ne saura guérir mon âme solitaire…

     

    Quand je pense à ce jour où elle m’a laissé,

    Je revois le rosier où brillait la cétoine

    Et, au jardin d’été, la splendeur des pivoines.

     

    Marcek

     


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  •  

     

     

     

     

    Jean-Pierre Claris de Florian (1755-1794).

     

    Recueil : Fables (1792).

     

     

     

     

     

    La taupe et le lapin.

    Fable XVIII, Livre I.

     

     Chacun de nous souvent connaît bien ses défauts ; 

    En convenir, c'est autre chose : 

    On aime mieux souffrir de véritables maux, 

    Que d'avouer qu'ils en sont cause. 

    Je me souviens, à ce sujet, 

    D'avoir été témoin d'un fait 

    Fort étonnant et difficile à croire : 

    Mais je l'ai vu ; voici l'histoire.

     

    Près d'un bois, le soir, à l'écart, 

    Dans une superbe prairie, 

    Des lapins s'amusaient, sur l'herbette fleurie, 

    A jouer au colin-maillard. 

    Des lapins ! direz-vous, la chose est impossible. 

    Rien n'est plus vrai pourtant : une feuille flexible 

    Sur les yeux de l'un d'eux en bandeau s'appliquait, 

    Et puis sous le cou se nouait : 

    Un instant en faisait l'affaire. 

    Celui que ce ruban privait de la lumière 

    Se plaçait au milieu ; les autres alentour 

    Sautaient, dansaient, faisaient merveilles, 

    S'éloignaient, venaient tour à tour 

    Tirer sa queue ou ses oreilles. 

    Le pauvre aveugle alors, se retournant soudain, 

    Sans craindre pot au noir, jette au hasard la patte : 

    Mais la troupe échappe à la hâte, 

    Il ne prend que du vent, il se tourmente en vain, 

    Il y sera jusqu'à demain. 

    Une taupe assez étourdie, 

    Qui sous terre entendit ce bruit, 

    Sort aussitôt de son réduit, 

    Et se mêle dans la partie. 

    Vous jugez que, n'y voyant pas, 

    Elle fut prise au premier pas. 

    Messieurs, dit un lapin, ce serait conscience, 

    Et la justice veut qu'à notre pauvre sœur 

    Nous fassions un peu de faveur ; 

    Elle est sans yeux et sans défense ; 

    Ainsi je suis d'avis... — Non, répond avec feu 

    La taupe, je suis prise, et prise de bon jeu ; 

    Mettez-moi le bandeau. — Très volontiers, ma chère ; 

    Le voici : mais je crois qu'il n'est pas nécessaire 

    Que nous serrions le nœud bien fort. 

    — Pardonnez-moi, monsieur, reprit-elle en colère, 

    Serrez bien, car j'y vois... Serrez, j'y vois encore.

     

     

     

    Jean-Pierre Claris de Florian. 

     

     

     

     

     


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    Un aveugle marchait à travers la montagne,

    d'une main son bâton, dans l'autre un chapelet,

    appuyé sur les bras d'un enfant, il allait;

    et dans l'horizon bleu s'effaçait la campagne.

     

    Des rochers et toujours des rochers autour d'eux,

    de grands blocs de granit à la morne attitude,

    des gorges, des ravins: sinistre solitude

    où le daim seul se fraye un chemin hasardeux.

     

    Or, les deux voyageurs (on était en automne)

    atteignent un ruisseau, peu large et fort bruyant.

    " Pourquoi nous arrêter ici?" dit en riant

    le vieillard à son fils qui s'arrête et s'étonne.

     

    "Ce fleuve n'est-il pas le Danube ou le Rhin ?"

    dit l'enfant "on croirait qu'il bouillone et qu'il fume

    il roule dans ses flots d'énormes blocs d'écume

    et de son onde, il sort un bruit de chars d'airain."

     

    " Comment passerons-nous ce fleuve-là mon père ?"

    - "Ne crains rien," lui répond l'aveugle, "car au fond,

    cela fait trop de bruit pour être bien profond,

    et nous traverserons ton fleuve je l'espère."

     

    Et soulevant l'enfant dans ses bras vigoureux,

    en trois pas, le vieillard franchit l'onde écumante

    qui, dans son lit en vain s'agite et se tourmente

    et s'épuise en efforts stériles et fiévreux.

     

    Puis il répond: "Mon fils, dans le monde où nous sommes,

    l'apparence souvent nous trompe et nous confond.

    Par leur dehors sournois et par le bruit qu'ils font,

    gardons-nous de juger, les ruisseaux et les hommes.

     

    André van Hasselt (*1806 à Maastricht †1874 ?)

     

     

     

     

     


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  • L'émouvante lettre d'adieu de Henri Fertet, résistant de 16 ans fusillé en 43

    C.L. | 08 Mai 2015, 13h09 | MAJ : 08 Mai 2015, 13h55

      

     

     

     

    Henri Fertet, résistant, a été fusillé en 1943 à l'âge de 16 ans.   DR

    « Chers parents, ma lettre va vous causer une grande peine, mais je vous ai vus si pleins de courage que, je n'en doute pas, vous voudrez bien encore le garder, par amour pour moi. 

     

    Vous ne pouvez savoir ce que moralement j'ai souffert dans ma cellule, [ce] que j'ai souffert de ne plus vous voir [.

     

    ..] pendant ces quatre-vingt-sept jours de cellule, votre amour m'a manqué plus que vos colis et, souvent, je vous ai demandé de me pardonner le mal que je vous ai fait [...] Avant, je vous aimais par routine plutôt mais, maintenant, je comprends tout ce que vous avez fait pour moi. Je crois être arrivé au vrai amour filial [...]

     

    Je meurs pour ma patrie, je veux une France libre et des Français heureux, non pas une France orgueilleuse et première Nation du monde, mais une France travailleuse, laborieuse et honnête. [...]

     

    Pour moi, ne vous faites pas de soucis, je garde mon courage et ma belle humeur jusqu'au bout et je chanterai "Sambre et Meuse" parce que c'est toi, ma chère petite maman, qui me l'a appris [...]

     

    Les soldats viennent me chercher. Je hâte le pas. Mon écriture est peut-être tremblée, mais c'est parce que j'ai un petit crayon. Je n'ai pas peur de la mort, j'ai la conscience tellement tranquille.

     

    Papa, je t'en supplie, prie, songe que si je meurs, c'est pour mon bien. Quelle mort sera plus honorable ? Je meurs volontairement pour ma patrie. Nous nous retrouverons bientôt tous les 4 au ciel. Qu'est-ce que cent ans ? [...]

     

    Adieu, la mort m'appelle, je ne veux ni bandeau ni être attaché. Je vous embrasse tous. C'est dur quand même de mourir. Mille baisers.

     

    Vive la France.

     

    Un condamné à mort de 16 ans. »

     

    Henri Fertet sera fusillé le 26 septembre 1943 après 87 jours d'emprisonnement et de tortures.


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    Vous n’avez réclamé la gloire ni les larmes

    Ni l’orgue ni la prière aux agonisants

    Onze ans déjà que cela passe vite onze ans

    Vous vous étiez servis simplement de vos armes

    La mort n’éblouit pas les yeux des Partisans 

     

    Vous aviez vos portraits sur les murs de nos villes

    Noirs de barbe et de nuit hirsutes menaçants

    L’affiche qui semblait une tache de sang

    Parce qu’à prononcer vos noms sont difficiles

    Y cherchait un effet de peur sur les passants 

     

    Nul ne semblait vous voir français de préférence

    Les gens allaient sans yeux pour vous le jour durant

    Mais à l’heure du couvre-feu des doigts errants

    Avaient écrit sous vos photos MORTS POUR LA FRANCE

    Et les mornes matins en étaient différents 

     

    Tout avait la couleur uniforme du givre

    À la fin février pour vos derniers moments

    Et c’est alors que l’un de vous dit calmement

    Bonheur à tous Bonheur à ceux qui vont survivre

    Je meurs sans haine en moi pour le peuple allemand 

     

    Adieu la peine et le plaisir Adieu les roses

    Adieu la vie adieu la lumière et le vent

    Marie-toi sois heureuse et pense à moi souvent

    Toi qui vas demeurer dans la beauté des choses

    Quand tout sera fini plus tard en Erivan 

     

    Un grand soleil d’hiver éclaire la colline

    Que la nature est belle et que le cœur me fend

    La justice viendra sur nos pas triomphants

    Ma Mélinée ô mon amour mon orpheline

    Et je te dis de vivre et d’avoir un enfant 

     

    Ils étaient vingt et trois quand les fusils fleurirent

    Vingt et trois qui donnaient leur cœur avant le temps

    Vingt et trois étrangers et nos frères pourtant

    Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir

    Vingt et trois qui criaient la France en s’abattant. 

     

    Louis Aragon, Le Roman inachevé, 1956 

     


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    Il était une fois un grain de café, une carotte et un oeuf... 

     

    Une jeune femme visite sa mère, lui parle de sa vie et lui confie combien elle a des difficultés à chaque journée. Elle ne sait pas comment elle va s’en sortir et elle envisage d’abandonner. Elle est tellement fatiguée de se battre continuellement. Elle a l’impression que lorsqu’un problème est résolu, un nouveau se présente. 

     

    Sa mère l’amène à la cuisine. Elle remplit trois casseroles d’eau et les met à chauffer  à feu élevé. L’eau se met à bouillir rapidement. Dans la première casserole, la mère ajoute des carottes. Elle met des œufs dans la deuxième casserole, et dans la troisième, elle met des grains de café moulu. Elle laisse reposer et bouillir, sans dire un mot.

     

    Au bout de 20 minutes, elle ferme le feu. Elle égoutte les carottes et les place dans un bol. Elle sort les œufs et les met dans un bol.

    Finalement, elle vide le café dans un bol.

    Se tournant vers sa fille, elle demande : "Dis-moi ce que tu vois ? "

    « Des carottes, des œufs et du café », répond la fille.

    Sa mère lui demande de se rapprocher des carottes. La fille se rapproche et note que les carottes sont molles. La mère lui demande ensuite de prendre un œuf et de briser la coquille, ce que fait la fille.

    Cette dernière observe alors que l’œuf est dur.

    Finalement, la mère demande à sa fille de goûter au café. La fille sourit en goûtant à l’arôme riche du café. 

     

    La fille lui demande ensuite :

    " Qu’est-ce que ça signifie, maman ? " 

     

    Sa mère lui explique que chacun de ces objets a fait face à la même adversité : de l’eau bouillante. Chacun a réagi différemment. Les carottes sont arrivées fortes et dures. Cependant, après avoir été soumises à l’eau bouillante, elles se sont ramollies et sont devenues faibles. Les œufs étaient fragiles. Leur coquille mince protégeait leur liquide intérieur, mais après avoir passé du temps dans l’eau bouillante, ils sont devenus plus durs à l’intérieur. Les grains de café moulu étaient uniques, quant à eux. Après avoir été soumis à l’eau bouillante, ils ont changé l’eau. 

     

    " Lequel es-tu ?" demande la mère à sa fille. " Quand l’adversité frappe à ta porte, comment réagis-tu ? Es-tu une carotte, un œuf ou un grain de café ?" 

     

    Souviens-toi de ceci : Lequel suis-je ? Suis-je la carotte qui semble forte, mais qui devient molle et perd de sa force devant la douleur et l’adversité ? 

     

    Suis-je un œuf qui débute avec un cœur malléable mais qui change quand la situation se réchauffe ? Ai-je un esprit fluide, mais après un décès, une rupture, une difficulté financière ou un autre défi, suis-je devenu plus dur et fermé ? Est-ce que ma coquille se ressemble, mais du côté intérieur, suis-je amer et dur avec un esprit rigide et un cœur de pierre ? 

     

    Ou suis-je un grain de café ? Le grain, en fait, change l’eau chaude, la circonstance qui amène la douleur. Lorsque l’eau devient chaude, il relâche sa fragrance et sa saveur. Si tu es comme le grain de café, quand les choses semblent être les pires, tu deviens meilleur et tu changes la situation autour de toi. 

     

    Quand les temps semblent les plus sombres et que les difficultés sont les plus grandes, est-ce que tu t’élèves à un autre niveau ? Comment gères-tu l’adversité ? Es-tu une carotte, un œuf ou un grain de café ? 

     

    Puisses-tu avoir suffisamment de joie pour te rendre doux, suffisamment de défis pour te rendre fort, suffisamment de peines pour te garder humain, et suffisamment d’espoir pour te garder heureux. 

     

    Les gens les plus heureux n’ont pas nécessairement le meilleur de tout; ils ne font que ressortir le meilleur de tout ce que la vie met sur leur route. L’avenir le plus clair sera toujours basé sur un passé oublié; tu ne peux pas aller de l’avant dans la vie à moins de laisser aller les blessures et tracas du passé."   

     

     

     

    Cette histoire me fait penser à une chanson que j'aime beaucoup :

     

    Chêne et Roseau des Cowboys Fringants

     

     

    Il est frêle le roseau

    La tête à moitié dans l’eau

    Et le chêne droit debout

    Semble être au dessus de tout

    Le roseau plie les genoux

    Et s’effondre à tous les coups

    Car c’est sa fatalité, toujours retomber

    Tomber, tomber pour se relever

     Re-tomber

    Tomber pour se relever

    « Même si le chêne est géant

    Il fendra dans l’ouragan

    Moi roseau par mauvais temps

    Je danse avec le vent »

     (Vue d’en haut)

    Le chêne est un grand sage

    Qui ne craint pas les orages

    Il sait que l’ouragan

    Ne se pointe pas souvent

    Et il regarde de haut

    Son pauvre ami le roseau

    Qui se bat d’arrache pied

    Pour se relever

    Toujours se relever pour tomber

    Comme toujours se relever

    Pour tomber

    « Le roseau dans la tourmente

    Est baladé par le vent

    Moi chêne par mauvais temps

    Je n’expose qu’un flanc »

    Il n’y a pas de morale

    A cette histoire banale

    Que des individus

    Et différents points de vue

     Pour se consoler un brin

    On rabaisse le voisin

    Il faut bien se relever

     Avant de tomber

    Tomber,

    Tomber et nous relever

    Re-tomber,

    Tomber et nous relever

    Chacun dans sa solitude

    Cultive ses certitudes

    Qui par instinct de survie

    Confortent nos vies

     


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    Solitude... Pour vous cela veut dire seul, 

    Pour moi - qui saura me comprendre ? 

    Cela veut dire : vert, vert dru, vivace tendre, 

    Vert platane, vert calycanthe, vert tilleul.

     

    Mot vert. Silence vert. Mains vertes 

    De grands arbres penchés, d'arbustes fous ; 

    Doigts mêlés de rosiers, de lauriers, de bambous, 

    Pieds de cèdres âgés où se concertent 

    Les bêtes à Bon Dieu ; rondes alertes 

    De libellules sur l'eau verte...

     

    Dans l'eau, reflets de marronniers, 

    D'ifs bruns, de vimes blonds, de longues menthes 

    Et de jeune cresson ; flaques dormantes 

    Et courants vifs où rament les " meuniers " ; 

    Rainettes à ressort et carpes vénérables ; 

    Martin-pêcheur... En mars, étoiles de pruniers, 

    De poiriers, de pommiers ; grappes d'érables.

    En mai, la fête des ciguës, 

    Celle des boutons d'or : splendeur des prés. 

    Clochers blancs des yuccas, lances aiguës 

    Et tiges douces, chèvrefeuille aux brins serrés, 

    Vigne-vierge aux bras lourds chargés de palmes, 

    Et toujours, et partout, fraîche, luisante, calme, 

    L'invasion du lierre à petits flots lustrés 

    Gagnant le mur des cours, les carreaux des fenêtres, 

    Les toits des pavillons vainement retondus... 

    Lierre nouant au front du chêne, au cou du hêtre, 

    Ses bouquets de grains noirs comme un piège tendu 

    A la grive hésitante ; vert royaume 

    Des merles en habit - royaume qui s'étend 

    Ainsi que dans un parc de Florence ou de Rome 

    En nappes d'émeraude et cordages flottants... 

    Lierre de cette allée au porche de lumière 

    Dont les platanes séculaires, chaque été, 

    Font une longue cathédrale verte - lierre 

    De la grotte en rocaille où dorment abrités 

    Chaque hiver, les callas et les cactus fragiles ; 

    Housse, que la poussière blanche de la ville 

    Givre à peine les soirs de très grand vent - pour moi, 

    Vert obligé des vieilles pierres, 

    Des arbres vieux, des toits qui penchent, des vieux toits -

     

    Un château ? Non, Madame, une gentilhommière, 

    Un ermitage vert qui sent les bois, le foin, 

    Où les bruits dé la route arrivent d'assez loin 

    Pour n'être plus qu'une musique en demi-teintes. 

    Un train sur le talus se hâte avec des plaintes, 

    Mais l'horizon tout rose et mauve qu'il rejoint

    Transpose le voyage en couleurs de légende. 

    On regarde un instant vers ces trains qui s'en vont 

    Traînant leur barbe grise - et c'est vrai qu'ils répandent 

    Un peu de nostalgie au fil de l'été blond...

     

    Mais le jazz des moineaux fait rage dans les feuilles, 

    Les pigeons blancs s'exaltent, le cyprès

    Est la tour enchantée où des notes s'effeuillent 

    Autour du rossignol. Du pré, 

    Monte la fièvre des grillons, des sauterelles, 

    Toutes les herbes ont des pattes, ont des ailes -

    Et l'Ane et le Cheval de la Fable sont là 

    Et Chantecler se joue en grand gala 

    Jour et nuit dans la cour où des plumes voltigent.

     

    Au clair de l'eau, c'est l'éternel prodige 

    Du têtard de velours devenu crapaud d'or, 

    De la voix de cristal parmi les râpes neuves 

    D'innombrables grenouilles. Le chat dort. 

    Dickette-chien s'affaire - et sur leur tête pleuvent 

    Des pastilles de lune ou de soleil brûlant. 

    S'il pleut vraiment, la pluie à pleins seaux ruisselants 

    S'éparpille de même aux doigts verts qui l'arrêtent.

     

    Un tilleul, des bambous. L'abri vert du poète, 

    Du vert, comprenez-vous ? Pour qu'aux vieilles maisons 

    Rien ne blesse les yeux sous leurs paupières lasses. 

    Douceur de l'arbre, de la mousse, du gazon...

    Vous dites : Solitude ? Ah ! dans l'heure qui passe, 

    Est-il rien de vivant plus vivant qu'un jardin, 

    De plus mystérieux, parfumé, dru, tenace,

    Et peuplé - si peuplé qu'il arrive soudain 

    Qu'on y discourt avec mille petits génies 

    Sortis l'on ne sait d'où, comme chez Aladin.

     

    Un mot vert... Qui dira la fraîcheur infinie 

    D'un mot couleur de sève et de source et de l'air 

    Qui baigne une maison depuis toujours la vôtre, 

    Un mot désert peut-être et desséché pour d'autres, 

    Mais pour soi, familier, si proche, tendre, vert 

    Comme un îlot, un cher îlot dans l'univers ?...

     

    Sabine Sicaud

     


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    Asseyons-nous tous deux près du chemin

     

     

     

     

    Asseyons-nous tous deux près du chemin,

    Sur le vieux banc rongé de moisissures,

    Et que je laisse, entre tes deux mains sûres,

    Longtemps s'abandonner ma main.

     

    Avec ma main qui longtemps s'abandonne

    A la douceur de se sentir sur tes genoux,

    Mon coeur aussi, mon coeur fervent et doux

    Semble se reposer, entre tes deux mains bonnes.

     

    Et c'est la joie intense et c'est l'amour profond

    Que nous goûtons à nous sentir si bien ensemble,

    Sans qu'un seul mot trop fort sur nos lèvres ne tremble,

    Ni même qu'un baiser n'aille brûler ton front.

     

    Et nous prolongerions l'ardeur de ce silence

    Et l'immobilité de nos muets désirs,

    N'était que tout à coup à les sentir frémir 

    Je n'étreigne, sans le vouloir, tes mains qui pensent ;

     

    Tes mains, où mon bonheur entier reste celé

    Et qui jamais, pour rien au monde,

    N'attenteraient à ces choses profondes

    Dont nous vivons, sans en devoir parler.

    Emile Verhaeren


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    Souple comme une liane

     Elle grimpe, vivace

     Et sensuelle femme

     Aux pergolas s'enlace.

     Elle épouse amoureuse

     Chacun de ses tuteurs

     Et bien voluptueuse

     Se tord aux chaudes heures.

     

    A mes yeux, dans mon cœur

     Elle fait le printemps

     Quand je la vois en fleurs

     Avec ravissement.

     

    Avenante d'accueil 

    Elle s'offre et m'héberge

     Vêtue de simples feuilles 

    Comme la vigne vierge.

     Je la vois s'étaler

     Juste au dessus de moi 

    Et ne peux qu'apprécier

     Son ombre avec émoi.

     

    A mes yeux, dans mon cœur

     Elle fait le printemps

     Quand je la vois en fleurs

     Avec ravissement.

     

    C'est une couturière

     Qui tout' pareille au lierre

     Recouvre les tonnelles 

    D'un habit de dentelles.

     Nature généreuse

     Cette belle chartreuse

     Me rend le plus heureux

     A voir la vie en bleu.

     

    A mes yeux, dans mon cœur

     Elle fait le printemps

     Quand je la vois en fleurs

     Avec ravissement.

     

    Elle tresse aux gouttières

     Des colliers de guirlandes

     Et comme des rivières 

    Ses grappes les descendent.

     Elles pleuvent de fleurs 

    Qui ruissellent et cascadent

     Et qui de leurs couleurs

     Pavoisent aux façades.

     

    A mes yeux, la glycine

     Fait toujours le printemps

     Car c'est elle, divine,

     Qui me ravit autant.

     Et Monet, je devine 

    S'est pamé tout autant.

     

     

     

     

    Ecrit par Louis Vibauver

     


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    Pour vivre clair, ferme et juste, 

    Avec mon coeur, j'admire tout 

    Ce qui vibre, travaille et bout 

    Dans la tendresse humaine et sur la terre auguste.

     

    L'hiver s'en va et voici mars et puis avril 

    Et puis le prime été, joyeux et puéril.

    Sur la glycine en fleurs que la rosée humecte, 

    Rouges, verts, bleus, jaunes, bistres, vermeils, 

    Les mille insectes 

    Bougent et butinent dans le soleil. 

    Oh la merveille de leurs ailes qui brillent 

    Et leur corps fin comme une aiguille 

    Et leurs pattes et leurs antennes 

    Et leur toilette quotidienne 

    Sur un brin d'herbe ou de roseau !

    Sont-ils précis, sont-ils agiles !

    Leur corselet d'émail fragile 

    Est plus changeant que les courants de l'eau ;

    Grâce à mes yeux qui les reflètent 

    Je les sens vivre et pénétrer en moi 

    Un peu ; 

    Oh leurs émeutes et leurs jeux 

    Et leurs amours et leurs émois 

    Et leur bataille, autour des grappes violettes !

    Mon coeur les suit dans leur essor vers la clarté, 

    Brins de splendeur, miettes de beauté, 

    Parcelles d'or et poussière de vie ! 

    J'écarte d'eux l'embûche inassouvie :

    La glu, la boue et la poursuite des oiseaux 

    Pendant des jours entiers, je défends leurs travaux ;

    Mon art s'éprend de leurs oeuvres parfaites ; 

    Je contemple les riens dont leur maison est faite 

    Leur geste utile et net, leur vol chercheur et sûr, 

    Leur voyage dans la lumière ample et sans voile 

    Et quand ils sont perdus quelque part, dans l'azur, 

    Je crois qu'ils sont partis se mêler aux étoiles.

     

    Mais voici l'ombre et le soleil sur le jardin

    Et des guêpes vibrant là-bas, dans la lumière ;

    Voici les longs et clairs et sinueux chemins 

    Bordés de lourds pavots et de roses trémières ;

    Aujourd'hui même, à l'heure où l'été blond s'épand 

    Sur les gazons lustrés et les collines fauves, 

    Chaque pétale est comme une paupière mauve 

    Que la clarté pénètre et réchauffe en tremblant. 

    Les moins fiers des pistils, les plus humbles des feuilles 

    Sont d'un dessin si pur, si ferme et si nerveux 

    Qu'en eux 

    Tout se précipite et tout accueille 

    L'hommage clair et amoureux des yeux.

     

    L'heure des juillets roux s'est à son tour enfuie, 

    Et maintenant 

    Voici le soleil calme avec la douce pluie 

    Qui, mollement, 

    Sans lacérer les fleurs admirables, les touchent ;

    Comme eux, sans les cueillir, approchons-en nos bouches 

    Et que notre coeur croie, en baisant leur beauté 

    Faite de tant de joie et de tant de mystère, 

    Baiser, avec ferveur, délice et volupté, 

    Les lèvres mêmes de la terre.

     

    Les insectes, les fleurs, les feuilles, les rameaux

    Tressent leur vie enveloppante et minuscule

    Dans mon village, autour des prés et des closeaux.

    Ma petite maison est prise en leurs réseaux.

    Souvent, l'après-midi, avant le crépuscule,

    De fenêtre en fenêtre, au long du pignon droit,

    Ils s'agitent et bruissent jusqu'à mon toit ;

    Souvent aussi, quand l'astre aux Occidents recule,

    J'entends si fort leur fièvre et leur émoi

    Que je me sens vivre, avec mon coeur,

    Comme au centre de leur ardeur.

     

    Alors les tendres fleurs et les insectes frêles 

    M'enveloppent comme un million d'ailes 

    Faites de vent, de pluie et de clarté. 

    Ma maison semble un nid doucement convoité 

    Par tout ce qui remue et vit dans la lumière. 

    J'admire immensément la nature plénière 

    Depuis l'arbuste nain jusqu'au géant soleil 

    Un pétale, un pistil, un grain de blé vermeil 

    Est pris, avec respect, entre mes doigts qui l'aiment ; 

    Je ne distingue plus le monde de moi-même, 

    Je suis l'ample feuillage et les rameaux flottants, 

    Je suis le sol dont je foule les cailloux pâles 

    Et l'herbe des fossés où soudain je m'affale 

    Ivre et fervent, hagard, heureux et sanglotant.

    Emile Verhaeren

     


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    Ah! le bon temps qui s'écoulait

     

    Dans le moulin de mon Grand-Père

     

    Pour la veillée, on s'assemblait

     

    Près du fauteuil de ma grand'mère.

     

     

     

    Ce que Grand-Père racontait

     

    Comme en silence on l'écoutait

     

    Et comme alors gaîment trottait

     

    Le vieux fuseau de ma grand'mère!

     

    Comme il trottait!

     

    Et quel bon temps! quel temps c'était!

     

     

     

    Grand-père était un vieux bonhomme,

     

    Il avait bien près de cent ans;

     

    Tout était vieux sous son vieux chaume,

     

    Hors les enfants de ses enfants.

     

    Vieux vins dans de vieilles armoires,

     

    Vieille amitié, douce toujours!

     

    Vieilles chansons, vieilles histoires,

     

    Vieux souvenirs des anciens jours!

     

     

     

    Grand'mère était la gaîté mème :

     

    On la trouvait toujours riant;

     

    Depuis le jour de son baptème,

     

    Elle riait en s'éveillant.

     

    De sa maison, riant asile,

     

    Elle était l'âme; aussi, depuis

     

    Que son fuseau reste immobile,

     

    On ne rit plus dans le pays.

     

     

     

    Le vieux moulin de mon Grand-Père

     

    Tout comme lui s'est abattu;

     

    Le vieux fuseau de ma grand'mère

     

    A la muraille est suspendu.

     

    Et vous, couchés sous l'herbe épaisse,

     

    Comme au vieux temps encore unis,

     

    Je crois vous voir quand le jour baisse,

     

    Et tout en larmes je redis:

     

     

     

    Ah! le bon temps qui s'écoulait

     

    Dans le moulin de mon Grand-Père!

     

    Pour la veillée, on s'assemblait

     

    Près du fauteuil de ma grand'mère.

     

    Ce que Grand-Père racontait

     

    Comme en silence on l'écoutait!

     

    Et comme alors gaîment trottait

     

    le vieux fuseau de ma grand'mère!

     

    Comme il trottait!

     

    Et quel bon temps! quel temps c'était!

     

     

     

     

     

     

     

    Édouard Plouvier (*1821 - †1876) 

     

    ps: suis toujours en pause

     

     

     

     

     


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  • Un jardin sous mes mots

     

    Roses, jasmins, iris, lilas, volubilis,

     Cerisiers du Japon et jeunes arbousiers,

     Colorant le matin de leurs chants printaniers

     Adornent mon jardin de vivants ex libris.

     

    Abeilles et frelons s’y disputant les lys,

     Piétinent les pistils sans aucune pitié,

     Alors que, s’échappant des pages d’un herbier,

     Un papillon de nuit dévore un myosotis.

     

    Solitaire et pensif, un arôme somnole

     Sous le dais argenté d’un antique olivier,

     Dont l’ombre de satin imite l’Acropole.

     

    Dans mon jardin aussi, le soleil a planté

     Une pure fontaine, comme un encrier,

     Où je plonge ma plume et bois l’éternité.

     

    Francis Etienne Sicard, 2009

     


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  • Paradis perdu

     

    pour Grete Knudsen

     

    Les branches s'écartaient pour nous

    laisser passage en retenant

    délicatement nos cheveux

    et nous proposaient des cerises

    dont le jus coulait sur nos joues

     

    C'était il y a si longtemps

    à peine si je me souviens

    il a fallu qu'on me raconte

    et que je retrouve des traces

    dans les peintures et chansons

     

    J'étais un enfant mais j'avais

    toutes les forces d'un adulte

    et tous ses désirs je passais

    de mère en fille et déposais

    des bébés poisseux dans leurs bras

     

    Tout cela semble disparu

    et pourtant tout cela perdure

    entre le miroir et l'image

    entre le rêve et le réveil

    entre la page et l'impression

     

    Les ronces nous griffaient sans nous

    infliger la moindre souffrance

    dessinant des fleurs sur nos peaux

    que les amoureux effaçaient

    en buvant les perles du sang

     

    La main dans la main nous courions

    entre les déserts et les sources

    choisissant les uns pour les autres

    les fruits des arbres du savoir

    dont nous comparions les saveurs

     

    J'étais à l'aise dans mon corps

    j'en connaissais tous les organes

    les maladies étaient amies

    je goûtais fièvres ou frissons

    dans des lits de boues et de feuilles

     

    Où était-ce ne saurais dire

    si loin de tout si près de toi

    jouissant du chaud comme du froid

    j'ai perdu la clef de la grille

    et j'erre comme une âme en peine

     

    Michel Butor

     

     


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  • Le 21 avril 1545, Pierre de Ronsard rencontre sa "Rose"

     

     

     

     

     

     

    Il y a très exactement 470 ans, un jeune poète de moins de 20 ans s’apprête à avoir l’un des plus gros coup de foudre de sa vie.

     

     

     

    Il y a très exactement 470 ans, un jeune poète de moins de 20 ans s’apprête à avoir l’un des plus gros coup de foudre de sa vie. Ce poète, c’est Pierre de Ronsard. Et la jeune personne qui a provoqué son émoi, c’est Cassandre Salviati, une toute jeune damoiselle de 14 ans, descendante d'une noble famille florentine,

     

    Ronsard rencontre Cassandre à l’occasion du passage de la cour au château de Blois, le 21 avril 1545. Elle est si jolie, et ses oeillades sont si douces, que le poète en tombe "raide amoureux". Un amour platonique, d’autant plus platonique que la belle se mariera l’année suivante avec un autre.

     

    Mais cet amour non consommé va inspirer à Ronsard l’une de ses odes les plus connues: “Mignonne allons voir si la rose”,

    où Ronsard compare Cassandre à la reine des fleurs, avant de conclure méchamment :

     

    “Cueillez, cueillez votre jeunesse, 

    Comme à cette fleur, la vieillesse 

    Fera tenir votre beauté”. 

     

     

     

     

    Il y a 470 ans....

     

     

     

    Suis hyper débordée.....je n'assure plus...rien


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    Le chanteur Richard Anthony sur la scène du Zenith à Paris, le 15 décembre 2006, lors d'un concert organisé dans le cadre de la tournée "Age tendre et têtes de bois" qui réunit les idoles de la chanson des années 60.

     

     

     J´ai pensé qu´il valait mieux

    Nous quitter sans un adieu.
    Je n´aurais pas eu le cœur de te revoir...
    Mais j´entends siffler le train,
    Mais j´entends siffler le train,
    Que c´est triste un train qui siffle dans le soir...

    Je pouvais t´imaginer, toute seule, abandonnée
    Sur le quai, dans la cohue des "au revoir".
    Et j´entends siffler le train,
    Et j´entends siffler le train,
    Que c´est triste un train qui siffle dans le soir...


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    André Lemoyne (1822-1907).

     

    Recueil : Les charmeuses (1864).

     

     

     

     

     

    Fleurs d'avril.

    À André Theuriet.

     

     

    Le bouvreuil a sifflé dans l'aubépine blanche ; 

    Les ramiers, deux à deux, ont au loin roucoulé, 

    Et les petits muguets, qui sous bois ont perlé, 

    Embaument les ravins où bleuit la pervenche.

     

    Sous les vieux hêtres verts, dans un frais demi-jour, 

    Les heureux de vingt ans, les mains entrelacées, 

    Echangent, tout rêveurs, des trésors de pensées 

    Dans un mystérieux et long baiser d'amour.

     

    Les beaux enfants naïfs, trop ingénus encore 

    Pour comprendre la vie et ses enchantements, 

    Sont émus en plein cœur de chauds pressentiments, 

    Comme aux rayons d'avril les fleurs avant d'éclore.

     

    Et l'homme ancien qui songe aux printemps d'autrefois, 

    Oubliant pour un jour le nombre des années, 

    Ecoute la voix d'or des heures fortunées 

    Et va silencieux en pleurant sous les bois.

     

     

     

    André Lemoyne. 

     

     

     

     

     

     

     


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  • Lorsqu’un homme n’a pas d’amour,

     Rien du printemps ne l’intéresse ;

     Il voit même sans allégresse,

     Hirondelles, votre retour ;

     

    Et, devant vos troupes légères

     Qui traversent le ciel du soir,

     Il songe que d’aucun espoir

     Vous n’êtes pour lui messagères.

     

    Chez moi ce spleen a trop duré,

     Et quand je voyais dans les nues

     Les hirondelles revenues,

     Chaque printemps, j’ai bien pleuré.

     

    Mais depuis que toute ma vie

     A subi ton charme subtil,

     Mignonne, aux promesses d’Avril

     Je m’abandonne et me confie.

     

    Depuis qu’un regard bien-aimé

     A fait refleurir tout mon être,

     Je vous attends à ma fenêtre,

     Chères voyageuses de Mai.

     

    Venez, venez vite, hirondelles,

     Repeupler l’azur calme et doux,

     Car mon désir qui va vers vous

     S’accuse de n’avoir pas d’ailes.

     

    François Coppée, Les mois

     


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